5) SUPPLIQUE POUR ETRE ENTERRE SUR LA PLAGE DE SETE

 

LES DEUX ONCLES


Mim         Ré                 Mim                Ré  Mim          Ré                           La7              Ré
C'était l'oncle Martin, c'était l'oncle Gaston, L'un aimait les Tommies, l'autre aimait les Teutons
                      Do                 Ré                    Do      Ré               Do                      Ré                  Do
Chacun, pour ses amis, tous les deux ils sont morts, Moi, qui n'aimais personne, eh bien ! Je vis encor Maintenant, chers tontons, que les temps ont coulé, Que vos veuves de guerre ont enfin convolé
Que l'on a requinqué, dans le ciel de Verdun, Les étoiles ternies du maréchal Pétain Maintenant que vos controverses se sont tues, Qu'on s'est bien partagé les cordes des pendus
Maintenant que John Bull nous boude, maintenant, Que c'en est fini des querelles d'Allemand Que vos filles et vos fils vont, la main dans la main, Faire l'amour ensemble et l'Europe de demain
Qu'ils se soucient de vos batailles presque autant, Que l'on se souciait des guerres de Cent Ans On peut vous l'avouer, maintenant, chers tontons, Vous l'ami les Tommies, vous l'ami des Teutons
Que, de vos vérités, vos contrevérités, Tout le monde s'en fiche à l'unanimité De vos épurations, vos collaborations, Vos abominations et vos désolations
De vos plats de choucroute et vos tasses de thé, Tout le monde s'en fiche à l'unanimité En dépit de ces souvenirs qu'on commémore, Des flammes qu'on ranime aux monuments aux Morts
Des vainqueurs, des vaincus, des autres et de vous, Révérence parler, tout le monde s'en fout La vie, comme dit l'autre, a repris tous ses droits, Elles ne font plus beaucoup d'ombre, vos deux croix
Et, petit à petit, vous voilà devenus, L'Arc de Triomphe en moins, des soldats inconnus Maintenant, j'en suis sûr, chers malheureux tontons, Vous, l'ami des Tommies, vous, l'ami des Teutons
Si vous aviez vécu, si vous étiez ici, C'est vous qui chanteriez la chanson que voici Chanteriez, en trinquant ensemble à vos santés, Qu'il est fou de perdre la vie pour des idées
Des idées comme ça, qui viennent et qui font, Trois petits tours, trois petits morts, et puis s'en vont Qu'aucune idée sur terre est digne d'un trépas, Qu'il faut laisser ce rôle à ceux qui n'en ont pas
Que prendre, sur-le-champ, l'ennemi comme il vient, C'est de la bouillie pour les chats et pour les chiens Qu'au lieu de mettre en joue quelque vague ennemi, Mieux vaut attendre un peu qu'on le change en ami
Mieux vaut tourner sept fois sa crosse dans la main, Mieux vaut toujours remettre une salve à demain Que les seuls généraux qu'on doit suivre aux talons, Ce sont les généraux des p'tits soldats de plomb
Ainsi, chanteriez-vous tous les deux en suivant, Malbrough qui va-t-en guerre au pays des enfants Ô vous, qui prenez aujourd'hui la clé des cieux, Vous, les heureux coquins qui, ce soir, verrez Dieu
Quand vous rencontrerez mes deux oncles, là-bas, Offrez-leur de ma part ces « Ne m'oubliez pas » Ces deux myosotis fleuris dans mon jardin, Un p'tit « forget me not » pour mon oncle Martin
« Un p'tit vergiss mein nicht » pour mon oncle Gaston, Pauvre ami des Tommies, pauvre ami des Teutons...

 

LE VINGT-DEUX SEPTEMBRE


Ré                                                                Fa#7 Sim                                         Fa#7
Un vingt-e-deux septembre au diable vous partîtes, Et, depuis, chaque année, à la date susdite,
Sim      Mi7               La Fa#7 Sim  Mi7  La7      Ré                                                 Fa#7
Je mouillais mon mouchoir en souvenir de vous... Or, nous y revoilà, mais je reste de pierre,
Sim                                                        Fa#7    Sim        Mi7          La    Fa#7      Sim Mi7        La
Plus une seule larme à me mettre aux paupières : Le vingt-e-deux septembre, aujourd'hui, je m'en fous.

On ne reverra plus, au temps des feuilles mortes, Cette âme en peine qui me ressemble et qui porte
Le deuil de chaque feuille en souvenir de vous... Que le brave Prévert et ses escargots veuillent
Bien se passer de moi, pour enterrer les feuilles : Le vingt-e-deux septembre, aujourd'hui, je m'en fous.

Jadis, ouvrant mes bras comme une paire d'ailes, Je montais jusqu'au ciel pour suivre l'hirondelle
Et me rompais les os en souvenir de vous... Le complexe d'Icare à présent m'abandonne,
L'hirondelle en partant ne fera plus l'automne : Le vingt-e-deux septembre, aujourd'hui, je m'en fous.

Pieusement noué d'un bout de vos dentelles, J'avais, sur ma fenêtre, un bouquet d'immortelles
Que j'arrosais de pleurs en souvenir de vous... Je m'en vais les offrir au premier mort qui passe,
Les regrets éternels à présent me dépassent : Le vingt-e-deux septembre, aujourd'hui, je m'en fous.

Désormais, le petit bout de cœur qui me reste, Ne traversera plus l'équinoxe funeste
En battant la breloque en souvenir de vous... Il a craché sa flamme et ses cendres s'éteignent,
Sim                                                    Fa#7    Sim        Mi7          Lam7    Rém   Sol7             Do
A peine y pourrait-on rôtir quatre châtaignes : Le vingt-e-deux septembre, aujourd'hui, je m'en fous.
                                                  Mi7 La
Et c'est triste de n'être plus triste sans vous

 

LA TONDUE


Sol7 Do                                    Sol7  Do                    Sol7   Do Sol7
La belle qui couchait avec le roi de Prusse, Avec le roi de Prusse
        Do                   La7        Rém               Ré9 Sol7 Do
A qui l'on a tondu le crâne rasibus, Le crâne rasibus

Son penchant prononcé pour les « ich liebe dich », Pour les « ich liebe dich »
Lui valut de porter quelques cheveux postiches, Quelques cheveux postiches

Les braves sans-culottes et les bonnets phrygiens, Et les bonnets phrygiens
Ont livré sa crinière à un tondeur de chiens, A un tondeur de chiens

J'aurais dû prendre un peu parti pour sa toison, Parti pour sa toison
J'aurais dû dire un mot pour sauver son chignon, Pour sauver son chignon

Mais je n'ai pas bougé du fond de ma torpeur, Du fond de ma torpeur
Les coupeurs de cheveux en quatre m'ont fait peur, En quatre m'ont fait peur

Quand, pire qu'une brosse, elle eut été tondue, Elle eut été tondue
J'ai dit : « C'est malheureux, ces accroche-cœur perdus, Ces accroche-cœur perdus »

Et, ramassant l'un d'eux qui traînait dans l'ornière, Qui traînait dans l'ornière
Je l'ai, comme une fleur, mis à ma boutonnière, Mis à ma boutonnière

En me voyant partir arborant mon toupet, Arborant mon toupet
Tous ces coupeurs de nattes m'ont pris pour un suspect, M'ont pris pour un suspect

Comme de la patrie je ne mérite guère, Je ne mérite guère
J'ai pas la Croix d'honneur, j'ai pas la croix de guerre, J'ai pas la croix de guerre

Et je n'en souffre pas avec trop de rigueur, Avec trop de rigueur
J'ai ma rosette à moi : c'est un accroche-cœur, C'est un accroche-cœur.

 

VENUS CALLIPYGE


Fa                                  Fa7                 Sib   Solm7       Do7   Fa    Rém Solm Do7 Fa
Que jamais l'art abstrait, qui sévit maintenant, N'enlève à vos attraits ce volume étonnant
Fa                                   Fa7            Sib   Solm7     Do7    Fa Rém Solm Do7 Fa
Au temps où les faux culs sont la majorité, Gloire à celui qui dit toute la vérité

Sol7                                                     La      Lam                          Ré        Lam             Ré
Votre dos perd son nom avec si bonne grâce, Qu'on ne peut s'empêcher de lui donner raison
Sol7                                                  La             Fa     Sol7  Do     La7 Rém Sol  Mi
Que ne suis-je, madame, un poète de race, Pour dire à sa louange un immortel blason,
Fa             Sol7   Do   La7 Rém Sol7  Do
Pour dire à sa louange un immortel blason

En le voyant passer, j'en eus la chair de poule, Enfin, je vins au monde et, depuis, je lui voue
Un culte véritable et, quand je perds aux boules, En embrassant Fanny, je ne pense qu'à vous,
En embrassant Fanny, je ne pense qu'à vous

Pour obtenir, madame, un galbe de cet ordre, Vous devez torturer les gens de votre entour
Donner aux couturiers bien du fil à retordre, Et vous devez crever votre dame d'atour,
Et vous devez crever votre dame d'atour

C'est le duc de Bordeaux qui s'en va, tête basse, Car il ressemble au mien comme deux gouttes d'eau
S'il ressemblait au vôtre, on dirait, quand il passe, « C'est un joli garçon que le duc de Bordeaux ! »,
« C'est un joli garçon que le duc de Bordeaux ! »

Ne faites aucun cas des jaloux qui professent, Que vous avez placé votre orgueil un peu bas
Que vous présumez trop, en somme de vos fesses, Et surtout, par faveur, ne vous asseyez pas,
Et surtout, par faveur, ne vous asseyez pas

Laissez-les raconter qu'en sortant de calèche, La brise a fait voler votre robe et qu'on vit
Écrite dans un cœur transpercé d'une flèche, Cette expression triviale : « A Julot pour la vie »,
Cette expression triviale : « A Julot pour la vie »

Laissez-les dire encor qu'à la cour d'Angleterre, Faisant la révérence aux souverains anglois
Vous êtes, patatras ! tombée assise à terre, La loi d'la pesanteur est dure, mais c'est la loi,
La loi d'la pesanteur est dure, mais c'est la loi

Nul ne peut aujourd'hui trépasser sans voir Naples, A l'assaut des chefs-d'œuvre ils veulent tous courir
Mes ambitions à moi sont bien plus raisonnables : Voir votre académie, madame, et puis mourir,
Voir votre académie, madame, et puis mourir

Que jamais l'art abstrait, qui sévit maintenant, N'enlève à vos attraits ce volume étonnant
Au temps où les faux culs sont la majorité, Gloire à celui qui dit toute la vérité

 

LE MOUTON DE PANURGE


      Sim                     Mi   Fa#7                 Sim      Fa#7            Sim La7
Elle n'a pas encor de plumes, La flèche qui doit percer son flanc
                   Ré                   La7                      Ré      La7           Ré Ré7
Et dans son cœur rien ne s'allume, Quand elle cède à ses galants.
       Sol   La7             Ré      Si7           Mim          Sol           Fa#7
Elle se rit bien des gondoles, Des fleurs bleues, des galants discours
            Sim    Fa#7       Sim                            Sol La7      Ré
Des Vénus de la vieille école, Celles qui font l'amour par amour
            Sim    Fa#7       Sim                            Sol La7      Sim
Des Vénus de la vieille école, Celles qui font l'amour par amour

N'allez pas croire davantage, Que le démon brûle son corps
Il s'arrête au premier étage, Son septième ciel, et encor
Elle n'est jamais langoureuse, Passée par le pont des soupirs
Et voit comme des bêtes curieuses, Celles qui font l'amour par plaisir
Et voit comme des bêtes curieuses, Celles qui font l'amour par plaisir

Croyez pas qu'elle soit à vendre, Quand on l'a mise sur le dos
On n'est pas tenu de se fendre, D'un somptueux petit cadeau
Avant d'aller en bacchanale, Elle présente pas un devis
Elle n'a rien de ces belles vénales, Celles qui font l'amour par profit
Elle n'a rien de ces belles vénales, Celles qui font l'amour par profit

Mais alors, pourquoi cède-t-elle, Sans coeur, sans lucre, sans plaisir
Si l'amour vaut pas la chandelle, Pourquoi le joue-t-elle à loisir
Si quiconque peut, sans ambages, L'aider à dégrafer sa robe
C'est parce qu'elle veut être à la page, Que c'est la mode et qu'elle est snob
C'est parce qu'elle veut être à la page, Que c'est la mode et qu'elle est snob

Mais changent coutumes et filles, Un jour, peut-être, en son sein nu
Va se planter pour toute la vie, Une petite flèche perdue
On n'verra plus qu'elle en gondole, Elle ira jouer, à son tour
Les Vénus de la vieille école, Celles qui font l'amour par amour
Les Vénus de la vieille école, Celles qui font l'amour par amour

 

LA ROUTE AUX QUATRE CHANSONS


La                     Mi7                La                Mi7
J'ai pris la route de Dijon, Pour voir un peu la Marjolaine,
      La              Mi7                  La                  Mi7
La belle, digue digue don, Qui pleurait près de la fontaine.
La                        Mi7           La                   Mi7
Mais elle avait changé de ton, Il lui fallait des ducatons
     La                     Mi7   La                         Rém Sol7
Dedans son bas de laine, Pour n'avoir plus de peine.
Do                      Sol7                 Do                  Sol7
Elle m'a dit : « Tu viens, chéri ? Et si tu me payes un bon prix
      Do           Sol7     Do                      Rém Mi7
Aux anges je t'emmène, Digue digue don daine. »
La                         Ré Mi7 La                             Ré Mi7 La
La Marjolaine pleurait surtout, Quand elle n'avait pas de sous.
                          Ré Mi7 La                            Ré Mi7 La
La Marjolaine de la chanson, Avait de plus nobles façons.

J'ai passé le pont d'Avignon, Pour voir un peu les belles dames
Et les beaux messieurs tous en rond, Qui dansaient, dansaient, corps et âmes.
Mais ils avaient changé de ton, Ils faisaient fi des rigodons,
Menuets et pavanes, Tarentelles, sardanes,
Et les belles dames m'ont dit ceci : « Étranger, sauve-toi d'ici
Ou l'on donne l'alarme, Aux chiens et aux gendarmes ! »
Quelle mouche les a donc piquées, Ces belles dames si distinguées ?
Les belles dames de la chanson, Avaient de plus nobles façons.

Je me suis fait faire prisonnier, Dans les vieilles prisons de Nantes,
Pour voir la fille du geôlier, Qui, paraît-il, est avenante.
Mais elle avait changé de ton, Quand j'ai demandé : « Que dit-on
Des affaires courantes, Dans la ville de Nantes ? »
La mignonne m'a répondu : « On dit que vous serez pendu
Aux matines sonnantes, Et j'en suis bien contente ! »
Les geôlières n'ont plus de cœur, Aux prisons de Nantes et d'ailleurs.
La geôlière de la chanson, Avait de plus nobles façons.

Voulant mener à bonne fin, Ma folle course vagabonde,
Vers mes pénates je revins, Pour dormir auprès de ma blonde,
Mais elle avait changé de ton, Avec elle, sous l'édredon,
Il y avait du monde, Dormant près de ma blonde.
J'ai pris le coup d'un air blagueur, Mais, en cachette, dans mon cœur,
La peine était profonde, L'chagrin lâchait la bonde.
Hélas ! du jardin de mon père, La colombe s'est fait la paire...
Par bonheur, par consolation, Me sont restées les quatre chansons.

 

SATURNE


        Si7                    Mim          Ré7                        Sol
Il est morne, il est taciturne, Il préside aux choses du temps
            Si7                    Do                            Lam Ré7         Sol
Il porte un joli nom, « Saturne », Mais c'est un Dieu fort inquiétant
            Si7                    Do                Mim             Si7         Mim
Il porte un joli nom, « Saturne », Mais c'est un Dieu fort inquiétant.

En allant son chemin, morose, Pour se désennuyer un peu
Il joue à bousculer les roses, Le temps tue le temps comme il peut.
Il joue à bousculer les roses, Le temps tue le temps comme il peut.

Cette saison, c'est toi, ma belle, Qui a fait les frais de son jeu,
Toi qui a dû payer la gabelle, Un grain de sel dans tes cheveux.
Toi qui a dû payer la gabelle, Un grain de sel dans tes cheveux.

C'est pas vilain, les fleurs d'automne, Et tous les poètes l'ont dit.
Je te regarde et je te donne, Mon billet qu'ils n'ont pas menti.
Je te regarde et je te donne, Mon billet qu'ils n'ont pas menti.

Viens encor, viens ma favorite, Descendons ensemble au jardin,
Viens effeuiller la marguerite, De l'été de la Saint-Martin.
Viens effeuiller la marguerite, De l'été de la Saint-Martin.

Je sais par cœur toutes tes grâces, Et pour me les faire oublier,
Il faudra que Saturne en fasse, Des tours d'horloge, de sablier !
Et la petite pisseuse d'en face, Peut bien aller se rhabiller.

 

LE GRAND PAN


Sim                                                 Do
Du temps que régnait le Grand Pan, Les dieux protégeaient les ivrognes 
Fa#7                  Sim         Do#7                   Fa#7
Un tas de génies titubants, Au nez rouge, à la rouge trogne. 
Sim                                                    Do
Dès qu'un homme vidait les cruchons, Qu'un sac à vin faisait carousse 
Fa#7                         Sim               Fa#7                  Sim
Ils venaient en bande à ses trousses, Compter les bouchons. 
     Mim                                             La7       Ré                                          Si7
La plus humble piquette était alors bénie, Distillée par Noé, Silène, et compagnie. 
     Mim                                                        Sim                                      Sol Fa#7 Sim
Le vin donnait un lustre au pire des minus, Et le moindre pochard avait tout de Bacchus. 
                  Ré                                              Do                       Sim       Do      Fa#7         Sim
Mais se touchant le crâne, en criant « J'ai trouvé », La bande au professeur Nimbus est arrivée 
                     Ré                                    Do                        Sim        La     Sim    La7
Qui s'est mise à frapper les cieux d'alignement, Chasser les Dieux du Firmament. 
        Ré              La7    Ré                La7            Ré               La7          Ré                Fa#7
Aujourd'hui ça et là, les gens boivent encore, Et le feu du nectar fait toujours luire les trognes. 
        Sim                 Fa#7     Sim               Fa#7               Mim          Sim                    Sol Fa#7 Sim
Mais les dieux ne répondent plus pour les ivrognes. Bacchus est alcoolique, et le grand Pan est mort. 

Sim                                           Do
Quand deux imbéciles heureux, S'amusaient à des bagatelles, 
Fa#7                  Sim           Do#7                   Fa#7
Un tas de génies amoureux, Venaient leur tenir la chandelle. 
Sim                                            Do
Du fin fond des Champs Elysées, Dès qu'ils entendaient un « Je t'aime », 
Fa#7                             Sim      Fa#7                Sim
Ils accouraient à l'instant même, Compter les baisers. 
     Mim                                             La7       Ré                                                 Si7
La plus humble amourette, était alors bénie, Sacrée par Aphrodite, Eros, et compagnie. 
     Mim                                                        Sim                                      Sol Fa#7 Sim
L'amour donnait un lustre au pire des minus, Et la moindre amoureuse avait tout de Vénus. 
                  Ré                                              Do                       Sim       Do      Fa#7         Sim
Mais se touchant le crâne, en criant « J'ai trouvé », La bande au professeur Nimbus est arrivée 
                     Ré                                    Do                        Sim        La     Sim    La7
Qui s'est mise à frapper les cieux d'alignement, Chasser les Dieux du Firmament. 
        Ré              La7    Ré                La7            Ré               La7          Ré                Fa#7
Aujourd'hui ça et là, les cœurs battent encore, Et la règle du jeu de l'amour est la même. 
        Sim                 Fa#7     Sim               Fa#7               Mim          Sim                    Sol Fa#7 Sim
Mais les dieux ne répondent plus de ceux qui s'aiment. Vénus s'est faite femme, et le grand Pan est mort. 

Sim                                          Do
Et quand fatale sonnait l'heure, De prendre un linceul pour costume 
Fa#7                  Sim                Do#7                   Fa#7
Un tas de génies l'œil en pleurs, Vous offraient les honneurs posthumes. 
Sim                                      Do
Pour aller au céleste empire, Dans leur barque ils venaient vous prendre. 
Fa#7                         Sim               Fa#7                  Sim
C'était presque un plaisir de rendre, Le dernier soupir. 
     Mim                                             La7       Ré                                          Si7
La plus humble dépouille était alors bénie, Embarquée par Caron, Pluton et compagnie. 
     Mim                                                        Sim                                      Sol Fa#7 Sim
Au pire des minus, l'âme était accordée, Et le moindre mortel avait l'éternité. 
                  Ré                                              Do                       Sim       Do      Fa#7         Sim
Mais se touchant le crâne, en criant « J'ai trouvé », La bande au professeur Nimbus est arrivée 
                     Ré                                    Do                        Sim        La     Sim    La7
Qui s'est mise à frapper les cieux d'alignement, Chasser les Dieux du Firmament. 
        Ré              La7    Ré                La7            Ré               La7          Ré                Fa#7
Aujourd'hui ça et là, les gens passent encore, Mais la tombe est hélas la dernière demeure 
        Sim                 Fa#7     Sim               Fa#7               Mim          Sim                    Sol Fa#7 Sim
Et les dieux ne répondent plus de ceux qui meurent. La mort est naturelle, et le grand Pan est mort. 

La7 Ré                                            Si7       Mim           Sim                                    Fa#7
Et l'un des derniers dieux, l'un des derniers suprêmes, Ne doit plus se sentir tellement bien lui-même 
Sol                La7              Ré                                 Lam         Si7               Mim
Un beau jour on va voir le Christ, Descendre du calvaire en disant dans sa lippe 
Sim                                                Fa#7                                Sol                        La                   Sim
« Merde je ne joue plus pour tous ces pauvres types ». J'ai bien peur que la fin du monde soit bien triste.

 

SUPPLIQUE POUR ÊTRE ENTERRÉ SUR LA PLAGE DE SÈTE


Sim                                                         Fa#7
La Camarde qui ne m'a jamais pardonné, D'avoir semé des fleurs dans les trous de son nez
Mim             La7               Ré Si7 Mim
Me poursuit d'un zèle imbécile. Alors cerné de près par les enterrements
Sim                                                                Sol                Fa#7    Sim Sol Fa#7
J'ai cru bon de remettre à jour mon testament, De me payer un codicille

Trempe dans l'encre bleue du golf du Lion, Trempe, trempe ta plume, ô mon vieux tabellion
Et de ta plus belle écriture, Note ce qu'il faudrait qu'il advint de mon corps
Lorsque mon âme et lui ne seront plus d'accord, Que sur un seul point : la rupture

Quand mon âme aura pris son vol à l'horizon, Vers celles de Gavroche et de Mimi Pinson
Celles des Titis, des Grisettes, Que vers le sol natal, mon corps soit ramené
Dans un sleeping du Paris - Méditerranée, Terminus en gare de Sète

Mon caveau de famille, hélas ! n'est pas tout neuf, Vulgairement parlant, il est plein comme un œuf
Et d'ici que quelqu'un n'en sorte, Il risque de se faire tard et je ne peux
Dire à ces braves gens : « Poussez-vous donc un peu ! Place aux jeunes » en quelque sorte

Juste au bord de la mer, à deux pas des flots bleus, Creusez, si c'est possible un petit trou moelleux,
Une bonne petite niche, Auprès de mes amis d'enfance les dauphins,
Le long de cette grève où le sable est si fin, Sur la plage de la corniche

C'est une plage où même à ses moments furieux, Neptune ne se prend jamais trop au sérieux
Où quand un bateau fait naufrage, Le capitaine crie : « Je suis le maître à bord !
Sauve qui peut le vin et le pastis d'abord ! Chacun sa bonbonne et courage ! »

Et c'est là que jadis à quinze ans révolus, A l'âge où s'amuser tout seul ne suffit plus,
Je connu la prime amourette. Auprès d'une sirène, une femme-poisson,
Je reçu de l'amour la première leçon, Avalai la première arête.

Déférence gardée envers Paul Valéry, Moi l'humble troubadour sur lui je renchéris,
Le bon maître me le pardonne. Et qu'au moins si ses vers valent mieux que les miens,
Mon cimetière soit plus marin que le sien, Et n'en déplaise aux autochtones.

Cette tombe en sandwich entre le ciel et l'eau, Ne donnera pas une ombre triste au tableau,
Mais un charme indéfinissable. Les baigneuses s'en serviront de paravent,
Pour changer de tenue et les petits enfants, Diront : chouette, un château de sable !

Est-ce trop demander : sur mon petit lopin, Planter, je vous en prie une espèce de pin,
Pin parasol de préférence. Qui saura prémunir contre l'insolation,
Les bons amis venus faire sur ma concession, D'affectueuses révérences.

Tantôt venant d'Espagne et tantôt d'Italie, Tous chargés de parfums, de musiques jolies,
Le Mistral et la Tramontane, Sur mon dernier sommeil verseront les échos,
De villanelle, un jour, un jour de fandango, De tarentelle, de sardane.

Et quand prenant ma butte en guise d'oreiller, Une ondine viendra gentiment sommeiller,
Avec moins que rien de costume, J'en demande pardon par avance à Jésus,
Si l'ombre de ma croix s'y couche un peu dessus, Pour un petit bonheur posthume.

Pauvres rois pharaons, pauvre Napoléon, Pauvres grands disparus gisant au Panthéon,
Pauvres cendres de conséquence ! Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Sim                                                                Sol        Fa#7      Sol La Si
Qui fait du pédalo sur la plage en rêvant, Qui passe sa mort en vacances.

 

LE FANTÔME


Sol                                                Mi7
C'était tremblant, c'était troublant, C'était vêtu d'un drap tout blanc,
       Lam   Re7                  Sol               Do               Sol
Ça présentait tous les symptômes, Tous les dehors de la vision,
      Si7              Mim    Do Sol Mim Lam Re7 Sol
Les faux airs de l'apparition, En un mot, c'était un fantôme !

A sa manière d'avancer, A sa façon de balancer
Les hanches quelque peu convexes, Je compris que j'avais affaire
A quelqu'un du genre que j'préfère : A un fantôme du beau sexe.

« Je suis un p'tit poucet perdu, Me dit-elle, d'une voix morfondue,
Un pauvre fantôme en déroute. Plus de trace des feux follets,
Plus de trace des osselets, Dont j'avais jalonné ma route ! »

« Des poètes sans inspiration, Auront pris - quelle aberration ! -
Mes feux follets pour des étoiles. De pauvres chiens de commissaire
Auront croqué - quelle misère ! - Mes osselets bien garnis de moelle. »

« A l'heure où le coq chantera, J'aurai bonne mine avec mon drap
Plein de faux plis et de coutures ! Et dans ce siècle profane où
Les gens ne croient plus guère à nous, On va crier à l'imposture. »

Moi, qu'un chat perdu fait pleurer, Pensez si j'eus le cœur serré
Devant l'embarras du fantôme. « Venez, dis-je en prenant sa main,
Que je vous montre le chemin, Que je vous reconduise at home »

L'histoire finirait ici, Mais la brise, et je l'en r'mercie,
Troussa le drap d'ma cavalière... Dame, il manquait quelques osselets,
Mais le reste, loin d'être laid, Était d'une grâce singulière.

Mon Cupidon, qui avait la, Flèche facile en ce temps-là,
Fit mouche et, le feu sur les tempes, Je conviai, sournoisement,
La belle à venir un moment, Voir mes icônes, mes estampes...

« Mon cher, dit-elle, vous êtes fou ! J'ai deux mille ans de plus que vous... »
« Le temps, madame, que nous importe ! » - Mettant le fantôme sous mon bras,
Bien enveloppé dans son drap, Vers mes pénates je l'emporte !

Eh bien, messieurs, qu'on se le dise : Ces belles dames de jadis
Sont de satanées polissonnes, Plus expertes dans le déduit
Que certaines dames d'aujourd'hui, Et je ne veux nommer personne !

Au p'tit jour on m'a réveillé, On secouait mon oreiller
Avec une fougue pleine de promesses. Mais, foin des délices de Capoue !
C'était mon père criant : « Debout ! Vains dieux, tu vas manquer la messe ! »

Mais, foin des délices de Capoue !
C'était mon père criant : « Debout ! Vains dieux, tu vas manquer la messe ! »

 

LA FESSÉE


Lam                                                      Rém    Lam                     Fa                               Si7 Mi
La veuve et l'orphelin, quoi de plus émouvant ? Un vieux copain d'école étant mort sans enfants,
Lam                    Fa                          Sol Do Mi Lam                                   Rém
Abandonnant au monde une épouse épatante, J'allai rendre visite à la désespérée.
Lam                       Fa                  Si7 Mi Lam                   Si7             Mi           Lam
Et puis, ne sachant plus où finir ma soirée, Je lui tins compagnie dans la chapelle ardente.

Pour endiguer ses pleurs, pour apaiser ses maux, Je me mis à blaguer, à sortir des bons mots,
Tous les moyens sont bons au médecin de l'âme... Bientôt, par la vertu de quelques facéties,
La veuve se tenait les côtes, Dieu merci ! Ainsi que des bossus, tous deux nous rigolâmes.

Ma pipe dépassait un peu de mon veston. Aimable, elle m'encouragea : « Bourrez-la donc,
Qu'aucun impératif moral ne vous arrête, Si mon pauvre mari détestait le tabac,
Maintenant la fumée ne le dérange pas ! Mais où diantre ai-je mis mon porte-cigarettes ? »

A minuit, d'une voix douce de séraphin, Elle me demanda si je n'avais pas faim.
« Ça le ferait-il revenir, ajouta-t-elle, De pousser la piété jusqu'à l'inanition :
Que diriez-vous d'une frugale collation ? » Et nous fîmes un petit souper aux chandelles.

« Regardez s'il est beau ! Dirait-on point qu'il dort ? Ce n'est certes pas lui qui me donnerait tort
De noyer mon chagrin dans un flot de champagne. » Quand nous eûmes vidé le deuxième magnum,
La veuve était émue, nom d'un petit bonhomme ! Et son esprit se mit à battre la campagne...

« Mon Dieu, ce que c'est tout de même que de nous ! » Soupira-t-elle, en s'asseyant sur mes genoux.
Et puis, ayant collé sa lèvre sur ma lèvre, « Me voilà rassurée, fit-elle, j'avais peur
Que, sous votre moustache en tablier d' sapeur, Vous ne cachiez coquettement un bec-de-lièvre... »

Un tablier de sapeur, ma moustache, pensez ! Cette comparaison méritait la fessée.
Retroussant l'insolente avec nulle tendresse, Conscient d'accomplir, somme toute, un devoir,
Mais en fermant les yeux pour ne pas trop en voir. Paf ! j'abattis sur elle une main vengeresse !

« Aïe ! vous m'avez fêlé le postérieur en deux ! » Se plaignit-elle, et je baissai le front, piteux,
Craignant avoir frappé de façon trop brutale. Mais j'appris, par la suite, et j'en fus bien content,
Que cet état de choses durait depuis longtemps : Menteuse ! la fêlure était congénitale.

Quand je levai la main pour la deuxième fois, Le cœur n'y était plus, j'avais perdu la foi,
Surtout qu'elle s'était enquise, la bougresse : « Avez-vous remarqué que j'avais un beau cul ? »
Et ma main vengeresse est retombée, vaincue ! Et le troisième coup ne fut qu'une caresse...

 

LE PLURIEL


Mim                    Si7              Mim        Si7                Mim           Si7           Mim                  La7
« Cher monsieur, m'ont-ils dit, vous en êtes un autre », Lorsque je refusai de monter dans leur train.
Rém             La7               Rém           La7            Ré7                                                            Sol7 (Sol5+)
Oui, sans doute, mais moi, j'fais pas le bon apôtre, Moi, je n'ai besoin de personne pour en être un.
Do                                                        Sol7                     Do                Fa        Do
Le pluriel ne vaut rien à l'homme et sitôt qu'on, Est plus de quatre on est une bande de cons.
                                                                     Sol7                           Do                    Fa     Sol7    Do
Bande à part, sacrebleu ! c'est ma règle et j'y tiens. Dans les noms des partants on n'verra pas le mien.

Dieu ! que de processions, de monômes, de groupes, Que de rassemblements, de cortèges divers,
Que de ligues, que de cliques, que de meutes, que de troupes ! Pour un tel inventaire il faudrait un Prévert.
Le pluriel ne vaut rien à l'homme et sitôt qu'on, Est plus de quatre on est une bande de cons.
Bande à part, sacrebleu ! c'est ma règle et j'y tiens. Parmi les cris des loups on n'entend pas le mien. Oui, la cause était noble, était bonne, était belle ! Nous étions amoureux, nous l'avons épousée.
Nous souhaitions être heureux tous ensemble avec elle, Nous étions trop nombreux, nous l'avons défrisée.
Le pluriel ne vaut rien à l'homme et sitôt qu'on, Est plus de quatre on est une bande de cons.
Bande à part, sacrebleu ! c'est ma règle et j'y tiens. Parmi les noms d'élus on n'verra pas le mien. Je suis celui qui passe à côté des fanfares, Et qui chante en sourdine un petit air frondeur.
Je dis, à ces messieurs que mes notes effarent : « Tout aussi musicien que vous, tas de bruiteurs ! »
Le pluriel ne vaut rien à l'homme et sitôt qu'on, Est plus de quatre on est une bande de cons.
Bande à part, sacrebleu ! c'est ma règle et j'y tiens. Dans les rangs des pupitres on n'verra pas le mien. Pour embrasser la dame, s'il faut se mettre à douze, J'aime mieux m'amuser tout seul, cré nom de nom !
Je suis celui qui reste à l'écart des partouzes. L'obélisque est-il monolithe, oui ou non ?
Le pluriel ne vaut rien à l'homme et sitôt qu'on, Est plus de quatre on est une bande de cons.
Bande à part, sacrebleu ! c'est ma règle et j'y tiens. Au faisceau des phallus on n'verra pas le mien. Pas jaloux pour un sou des morts des hécatombes, J'espère être assez grand pour m'en aller tout seul.
Je ne veux pas qu'on m'aide à descendre à la tombe, Je partage n'importe quoi, pas mon linceul.
Le pluriel ne vaut rien à l'homme et sitôt qu'on, Est plus de quatre on est une bande de cons.
Bande à part, sacrebleu ! c'est ma règle et j'y tiens. Au faisceau des tibias on n'verra pas les miens.

 

LES QUATRE BACHELIERS


La                     Fa#m     Sim  Ré Fa#m   Sim7 Mi7 La                    Fa#m  Sim Fa#m Mi7 La Sol7
Nous étions quatre bacheliers, Sans      vergogne,    La vraie crème des écoliers, Des écoliers.
Do                  Lam       Rém  Fa Lam   Rém7 Sol7 Do                       Lam      Rém Lam Sol7   Do  Mi7
Pour offrir aux filles des fleurs, Sans  vergogne,        Nous nous fîmes un peu voleurs, Un peu voleurs.

Les sycophantes du pays, Sans vergogne, Aux gendarmes nous ont trahis, Nous ont trahis.
Et l'on vit quatre bacheliers, Sans vergogne, Qu'on emmène, les mains liées, Les mains liées.

On fit venir à la prison, Sans vergogne, Les parents des mauvais garçons, Mauvais garçons.
Les trois premiers pères, les trois, Sans vergogne, En perdirent tout leur sang-froid, Tout leur sang-froid.

Comme un seul ils ont déclaré, Sans vergogne, Qu'on les avait déshonorée, Déshonorés.
Comme un seul ont dit : « C'est fini », Sans vergogne, « Fils indigne, je te renie, Je te renie. »

Le quatrième des parents, Sans vergogne, C'était le plus gros, le plus grand, Le plus grand.
Quand il vint chercher son voleur, Sans vergogne, On s'attendait à un malheur, A un malheur.

Mais il n'a pas déclaré, non, Sans vergogne, Que l'on avait sali son nom, Sali son nom.
Dans le silence on l'entendit, Sans vergogne, Qui lui disait : « Bonjour, petit, Bonjour petit. »

On le vit, on le croirait pas, Sans vergogne, Lui tendre sa blague à tabac, Blague à tabac.
Je ne sais pas s'il eut raison, Sans vergogne, D'agir d'une telle façon, Telle façon.

Mais je sais qu'un enfant perdu, Sans vergogne, A de la corde de pendu, De pendu,
A de la chance quand il a, Sans vergogne, Un père de ce tonneau-là, Ce tonneau-là.

Et si les chrétiens du pays, Sans vergogne, Jugent que cet homme a failli, Homme a failli.
Ça laisse à penser que, pour eux, Sans vergogne, L'Évangile, c'est de l'hébreu, C'est de l'hébreu.

 

LE BULLETIN DE SANTÉ


La                                                              Do#  Ré                                          Do#
J'ai perdu mes bajoues,  j'ai perdu ma bedaine, Et, ce, d'une façon si nette, si soudaine,
         Fa#m                           Ré                        Si7                   Mi7                     La
Qu'on me suppose un mal qui ne pardonne pas, Qui se rit d'Esculape et le laisse baba.

Le monstre du Loch Ness ne faisant plus recette, Durant les moments creux dans certaines gazettes,
Systématiquement, les nécrologues jouent, À me mettre au linceul sous des feuilles de chou.

Or, lassé de servir de tête de massacre, Des contes à mourir debout qu'on me consacre,
Moi qui me porte bien, qui respire la santé, Je m'avance et je crie toute la vérité.

Toute la vérité, messieurs, je vous la livre, Si j'ai quitté les rangs des plus de deux cents livres,
C'est la faute à Mimi, à Lisette, à Ninon, Et bien d'autres, j'ai pas la mémoire des noms.

Si j'ai trahi les gros, les joufflus, les obèses, C'est que je baise, que je baise, que je baise
Comme un bouc, un bélier, une bête, une brute, Je suis hanté : le rut, le rut, le rut, le rut !

Qu'on me comprenne bien, j'ai l'âme du satyre, Et son comportement, mais ça ne veut point dire
Que j'en aie le talent, le génie, loin s'en faut ! Pas une seule encore ne m'a crié « bravo ! »

Entre autres fines fleurs, je compte, sur ma liste, Rose, un bon nombre de femmes de journalistes
Qui, me pensant fichu, mettent toute leur foi, A m'donner du bonheur une dernière fois.

C'est beau, c'est généreux, c'est grand, c'est magnifique ! Et, dans les positions les plus pornographiques,
Je leur rends les honneurs à fesses rabattues, Sur des tas de bouillons, des paquets d'invendus.

Et voilà ce qui fait que, quand vos légitimes, Montrent leurs fesses au peuple ainsi qu'à vos intimes,
On peut souvent y lire, imprimés à l'envers, Les échos, les petits potins, les faits divers.

Et si vous entendez sourdre, à travers les plinthes, Du boudoir de ces dames, des râles et des plaintes,
Ne dites pas : « C'est tonton Georges qui expire », Ce sont tout simplement les anges qui soupirent.

Et si vous entendez crier comme en quatorze : « Debout ! Debout les morts ! » ne bombez pas le torse,
C'est l'épouse exaltée d'un rédacteur en chef, Qui m'incite à monter à l'assaut derechef.

Certes, il m'arrive bien, revers de la médaille, De laisser quelquefois des plumes à la bataille...
Hippocrate dit : « Oui, c'est des crêtes de coq », Et Gallien répond « Non, c'est des gonocoques... »

Tous les deux ont raison. Vénus parfois vous donne, De méchants coups de pied qu'un bon chrétien pardonne,
Car, s'ils causent du tort aux attributs virils, Ils mettent rarement l'existence en péril.

Eh bien, oui, j'ai tout ça, rançon de mes fredaines. La barque pour Cythère est mise en quarantaine.
Mais je n'ai pas encor, non, non, non, trois fois non, Ce mal mystérieux dont on cache le nom.

Si j'ai trahi les gros, les joufflus, les obèses, C'est que je baise, que je baise, que je baise
Comme un bouc, un bélier, une bête, une brute, Je suis hanté : le rut, le rut, le rut, le rut !